[Tribune] - Le baptême de la religion au Cameroun : analyse sur le droit de la croyance en Dieu

Dans cette tribune libre, Dr. Emmanuel NGAMBEKET, Prix SENGHOR du plus jeune Docteur en Droit au Cameroun 2022 parle de la promotion et de la protection de la liberté religieuse.
Dr.Ngambeket, Prix SENGHOR du plus jeune Docteur en Droit au Cameroun 2022, juriste et conseil.

Par  Dr. Emmanuel Latendresse NGAMBEKET (HK)

Au Cameroun comme partout en Afrique, on note une volonté de ne pas empêcher aux citoyens de croire en Dieu. Cette volonté est concrétisée par la consécration de la liberté religieuse et la séparation de l'État de l'Eglise. 

En rappel, la religion a toujours été érigée en mécanisme de régulation sociale sur le croissant de la crainte de Dieu. Puisque l'amélioration morale de l'homme constitue la fin propre de toute religion rationnelle [Emmanuel KANT in La religion dans les limites de la raison].

Dans l'optique de favoriser ce dessein céleste purificateur de consciences, les pouvoirs publics reconnaissent le droit pour chacun de choisir son Dieu et d'assumer sa croyance. Ainsi, la liberté de religion est aménagée au Cameroun par le truchement de la Constitution qui affirme "la liberté du culte et sa garantie".  

Cette énonciation sommaire ne donne pas de détails sur l'exercice de ce droit fondamental. Pour mieux cerner ses contours et mesurer ses pourtours, il échoit de se référer à la loi du 19 décembre 1990, portant liberté d'association. Cette loi organique a le mérite de définir les conditions de création des congrégations religieuses et les modalités d'exercice de la liberté subséquente. Il s'en suit que le régime applicable aux associations religieuses est celui de l'autorisation délivrée par décret présidentiel [article 5 et 24 de la loi de 1990].  

Les chrétiens, les musulmans et les animistes, peuvent alors mener leurs activités cultuelles en toute liberté et sans être inquiétés en raison de leur conviction, sauf caution du respect de l'ordre public. 

Cette expression de la laïcité de la République camerounaise est à saluer. Le Gouvernement en reconnaissant la liberté du culte exécute immanquablement les vœux divins de l'État de droit. Bien plus, la pratique des fêtes religieuses est admise, la loi de 1973 fixant le régime des fêtes légales reconnaît les fêtes religieuses [articles 1 et 2 ] et déclare non-ouvrables les services publics durant les célébrations d'inspiration religieuse.

"Il n'y a pas de  liberté sans garantie", dit un contemporain. La liberté de conscience constitutionnellement reconnue est garantie par les Juridictions. Le juge administratif contrôle les actes de l'administration pour veiller au respect de la légalité [article 2 alinéa 3 de la loi de 2006 sur les tribunaux administratifs]. De son côté, le juge judiciaire réprime les atteintes à la liberté religieuse, perpétrées par les particuliers. A ce titre, il sanctionne l'outrage aux religions [article 241 alinéa 1 du Code pénal]. La Commission des Droits de l'Homme du Cameroun [CDHC], est une autorité administrative indépendante créée par la loi du 19 juillet 2019. Cette institution de consultation, d'observation, d'évaluation, de dialogue, de concertation, de promotion et de protection des droits de l'homme joue un rôle non négligeable en matière de protection de la liberté religieuse. 

Tout compte fait, la réalité de la liberté religieuse est légitimement limitée. Comme toutes les libertés publiques, la liberté de conscience est surveillée. Il faut qu'il y ait une régularisation étatique des groupes religieux pour que l'ordre public soit maintenu. L'Etat contrôle impérieusement les associations religieuses pour combattre les doctrines intégristes, les discours pernicieux pour la cohésion sociale et les appels  à la désobéissance civile [articles 111, 112 et 116 du Code pénal].

Suivez nous