Cameroun / Tet’ekombo 2025 : Une première journée empreinte de mémoire et d’hommage aux héros de la résistance coloniale
La ville de Douala s’est réveillée ce matin dans une ambiance solennelle et fédératrice, marquée par le lancement officiel de la 111ème édition du Tet’ekombo, un événement mémoriel qui, du 04 au 08 août 2025, rend hommage aux figures héroïques de la résistance camerounaise face à la colonisation allemande (1884-1916). Sous le thème évocateur « Le devoir de mémoire ».

Cette édition du Tet’ekombo se veut un vibrant appel à l’unité nationale et à la réappropriation d’une histoire commune, celle d’un peuple qui, malgré les vicissitudes du passé, continue de tracer sa trajectoire. Le lancement de ce jour était chargé de symboles
La journée inaugurale s’est ouverte par une conférence de presse organisée dans la case communautaire de la chefferie supérieure du canton Bell, un lieu emblématique où l’histoire des Sawa résonne à chaque pierre.
Le panel, composé de figures de proue telles que Marylin Douala Manga Bell, fondatrice de Doual’art, Richard Moukoko et l’homme de culture Henri Manga, a donné le ton : le Tet’ekombo 2025 ne se contentera pas de célébrer les icônes bien connues comme Rudolf Duala Manga Bell ou Adolf Ngosso Din. Il s’agit d’aller au-delà, de redonner vie et chair à toutes les figures, connues ou anonymes, qui ont résisté à l’oppression coloniale allemande pour défendre l’idée d’un « Kamerun » uni.
Les mots des panélistes lors de la conférence de presse ont résonné comme un appel à la réhumanisation de cette histoire trop souvent reléguée aux oubliettes. Le comité d’organisation, par la voix de ses membres, a insisté sur la nécessité de faire du Tet’ekombo un moment de rassemblement, un creuset où les Camerounais, toutes origines confondues, se retrouvent autour d’une mémoire partagée. Aussi, d’engager le gouvernement camerounais à une véritable reconnaissance.
Recueillement et dépôt de gerbes : un hommage vibrant
Après la conférence de presse, la solennité a pris une tournure encore plus poignante avec une cérémonie de recueillement et de dépôt de gerbes de fleurs au caveau des rois Bell. Menée par Jean Bernard Ndongo Ngono, troisième adjoint préfectoral du Wouri, aux côtés de Son Altesse Royale S.M. Jean-Yves Éboumbou Douala Manga Bell, King Bell, et du maire de la ville de Douala, Dr Roger Mbassa Ndine, cette étape a vu les autorités traditionnelles, les élites et la société civile se recueillir dans un silence empreint de respect.
Le cortège s’est ensuite dirigé vers le cimetière de Njo-Njo, où une stèle érigée à la mémoire d’Adolf Ngosso Din a accueilli un nouveau dépôt de gerbes, symbolisant l’hommage à ce martyr dont le sacrifice continue d’inspirer.
Ces gestes, simples mais lourds de sens, rappellent que le Tet’ekombo n’est pas seulement une commémoration, mais un acte de transmission.
La symbolique du Tet’ekombo : un pont entre passé et avenir
Le Tet’ekombo, dont l’édition 2025 marque les 111 ans de la pendaison des martyrs du 08 août 1914, porte une symbolique profonde. Il ne s’agit pas simplement de se souvenir des suppliciés de l’ère coloniale allemande, mais de raviver l’idée d’un Cameroun indivisible, tel que l’avaient rêvé Rudolf Duala Manga Bell, Adolf Ngosso Din et tant d’autres. Ces figures, issues du « Kamerun » d’alors, incarnaient une résistance qui transcendait les clivages ethniques et régionaux, un idéal que le Tet’ekombo 2025 ambitionne de raviver.
En célébrant ces héros, l’événement met en lumière une période charnière de l’histoire camerounaise, marquée par l’oppression mais aussi par une lutte acharnée pour la dignité et la souveraineté. Cette mémoire, souvent éclipsée par les récits officiels, est aujourd’hui remise au centre du débat, non pas pour rouvrir des blessures, mais pour construire un sentiment d’appartenance collective.
Une programmation riche pour les jours à venir
Le Tet’ekombo 2025 ne s’arrête pas à cette première journée. Le 07 août, le Palais de la culture Sawa accueillera l’ouverture officielle de l’exposition « Il était une fois la naissance du Staat Kamerun 1884-1914 », fruit d’une collaboration entre Doual’art, le Goethe Institut, la Ville de Douala et le Musée national. Cette exposition, qui se prolongera jusqu’au 06 décembre 2025, promet d’offrir un regard immersif et nuancé sur la période coloniale allemande, à travers des archives, des objets et des récits reconstitués.
Le point d’orgue de l’événement aura lieu le 08 août à Bonanjo, sur le lieu même où furent pendus les martyrs en 1914. Des processions solennelles mèneront les participants du caveau des rois Bell au cimetière de Njo-Njo, ponctuées de prières et de rites traditionnels. Ce moment, attendu par toute la communauté, scellera l’édition 2025 dans une communion collective autour de la mémoire des héros.
Rendez-vous est donc pris pour les prochains jours, où Douala vibrera au rythme de cette mémoire vivante, portée par un peuple déterminé à ne jamais oublier.