Cameroun : Refus de paiement de l’aide publique à la presse privée 2022 : les patrons de presse montent au créneau

Une grande manifestation des patrons de presse au Ministère des finances la semaine prochaine.

Les journalistes de la presse privée seraient-ils indésirables au Cameroun ? Le constat est dur, excessif sans doute. Une véritable catharsis. Le Ministère des finances bloque encore le « misérable » appui institutionnel de l'État à la presse privée. Après plusieurs relances du Ministère de la communication, le ministre des finances, Louis Paul Motaze a finalement ordonné le paiement immédiat de la somme prévue: soit environ 100 millions de FCFA . Que c’est misérable pour environ 200 titres. Le processus a suivi son cours normal. Sauf que les responsables du Minfi accusent le directeur général du Trésor, Moh Sylvester de bloquer le paiement depuis des mois. 

Rendus dans ses services au ministère des finances, certains cadres affirment qu’il « n’y a pas l’argent ».  Excédés par ce traitement dégradant vis-à-vis de la presse privée chaque année, certains patrons de presse ont décidé de manifester au cabinet du directeur général Moh Sylvester la semaine prochaine. Ce serait en présence de plusieurs médias nationaux et internationaux. Le jour n’a pas été indiqué. Mais tous estiment que la direction générale du trésor est devenue le « mouroir » de la presse privée: les factures des entreprises de presse y sont systématiquement bloquées. Entre-temps, sans moyens, l’entreprise de presse doit payer les salaires, le loyer, les frais d’électricité, de câbles, les impôts, la CNPS, l’imprimerie… Où prennent-ils cet argent alors qu’aucune de leurs factures n’est soldée pendant toute une année ? On va fermer nos portes. C’est ce qu’ils veulent. 

Rappelons que la précarité financière de la presse privée, elle est réelle. Due à l’absence de subventions, à l’absence d’un lectorat large, solvable et régulier, à l’étroitesse du marché publicitaire et aux difficultés d’une distribution correcte, elle a pour conséquence les conditions de dépendance et de misère pécuniaire dans lesquelles vivent nombre de journalistes. Pour réussir leur vie, les plus audacieux ou les plus talentueux d’entre eux rejoignent le mouvement général de fuite des cerveaux : ils travaillent de ou pour l’étranger. 

Un petit nombre s’obstinent encore, avec courage, à vivre leur vocation sur place, comme un sacerdoce privé des deniers du culte. Beaucoup, la majorité sans doute, se battent avec leurs fins de mois, les tentations multiples et la condescendance vaguement méprisante dans laquelle les tiennent les autorités locales. Privés d’informations, sans accès aux sources, ils se nourrissent de rumeurs – une légèreté professionnelle dont les pouvoirs tirent prétexte pour les déconsidérer – autant que de ragots et de bières fraîches le paysage médiatique Camerounais a radicalement changé. 

Cette presse privée, hélas ! est trop souvent privée de moyens et considération. Confrontée aux difficultés économiques, et à l’écart grandissant entre une minorité qui voit ses revenus croître et une majorité gagnée par la pauvreté, la presse privée broie le noir. Dans les sociétés modernes, l’information est un droit du citoyen. La presse garant de ce droit doit être ménagé car il est un marqueur de la démocratie.

Par conséquent, l’entreprise de presse n’est pas une entreprise comme les autres, eu égard à ses missions sociales d’éducation et de formation. Elle doit bénéficier de conditions particulières pour son développement. Ainsi, le Réseau des patrons de Presse du Cameroun exige la revalorisation de l’appui institutionnel de l’Etat à la presse privée à 4 milliards de FCFA ; la mise en place à terme d’un fonds de développement de la presse ; la mise en place d’un régime fiscal spécial pour l’entreprise de presse au Cameroun...

Par Zephirin Koloko, patron de presse

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