Jacques Bougha, vous annoncez votre candidature à la candidature à la présidentielle 2025, qu'est-ce qui vous convainc que vous êtes l'homme de la situation au Cameroun ?
Je ne me présente pas comme l'homme de la situation. Ce serait un manque de modestie. Je suis Jacques Bouhga, docteur en économie, ingénieur diplômé à l’Ecole centrale de Paris. J’ai une grande expérience internationale, notamment au Fonds monétaire international où j'ai beaucoup appris sur tous les pays. Je viens avec des solutions très simples et très concrètes pour sortir notre pays de cette situation. Nos problèmes paraissent difficiles ; mais en réalité les solutions sont simples. Et je propose des solutions simples, surtout sur le plan économique, avec le modèle de 100 fcfa dont on pourra parler tout à l'heure.

C'est vrai que vous êtes économiste, mais votre nom apparaît subitement sur la scène politique nationale, concrètement qui vous êtes ?
D’un, à part d’être économiste, je suis aussi un agriculteur ; donc j'ai une expérience du terrain au Cameroun et j'ai eu des contacts discrets avec la classe politique. J’avais un devoir de réserve comme un fonctionnaire international, mais j'étais en collaboration étroite avec le parti qui m'investit. Donc ce n'est pas une nouvelle affaire; je ne sors pas de nulle part. C'est juste comme les forces de l'ordre. J'avais un devoir de réserve en tant que fonctionnaire international et maintenant je sors de l'ombre.
J'étais dans l'ombre pour beaucoup de gens, mais pas pour le parti politique avec lequel je travaille, qui m'investit, je n’étais pas dans l’ombre. C'est vrai que les Camerounais ne me connaissaient pas encore, mais j'écrivais beaucoup. J'ai planifié ceci depuis des années. C’est pourquoi mon projet de société est très détaillé. En fait, ce qui m'a fait d’ailleurs tourner en économie c’est le Cameroun. J'étais ingénieur et en 1998, j'ai décidé de virer en économie parce que je voulais rentrer au Cameroun et aider notre pays à se développer.
Donc à partir de ce moment, je suis devenu discrètement politique. Il y a de cela cinq, six ans, j'ai noué des contacts avec certains partis politiques, comme celui qui m'investit présentement et voilà comment je travaillais dans l'ombre. Les Camerounais vont voir dans le livre, « Kamerun: propositions pour un nouveau départ » qui est déjà en ligne et qui paraîtra bientôt au Cameroun sous forme papier que j'ai beaucoup de détails sur beaucoup de sujets d’intérêt public de ces dernières années. C'est juste que je ne pouvais pas en parler à cause du devoir de réserve que j'avais comme fonctionnaire international.
Alors vous vous dévoilez à quelques jours de la convocation du corps électoral. Est-ce que vous aurez le temps matériel pour vous faire connaître?
C'est un programme que vous proposez, mais il y a aussi l'homme…
J'ai déjà déclaré ma candidature le 10 mai dernier, certes ça n'a pas eu l'écho que j'avais espéré, mais certaines personnes déjà, certains Camerounais, certains membres de mon équipe, ont sauté sur cette occasion pour venir me soutenir. Là mon action sur le terrain va reposer sur une stratégie bien détaillée, préparée par le parti politique qui m'investit. Et cette stratégie inclut des personnes ressources qui vont soutenir la campagne. Moi-même je vais visiter tous les départements et on a le temps de le faire.
J'organiserai des meetings, mais je reposerai mon action politique sur des équipes qui iront parler au nom de notre coalition autour du parti qui m'investit, qui vont expliquer jusqu'aux localités les plus reculées, le message que je transmets là : celui de téléphone à fournir à tous les citoyens, celui du modèle de financement populaire, celui des agriculteurs ; parce que, moi-même étant agriculteur, je connais les problèmes des agriculteurs. Et beaucoup de Camerounais sont soit des paysans, soit des agriculteurs, soit des éleveurs.
Je mettrai sur pied une entreprise populaire, l'Agricultural Development Corporation, qui va absorber la CDC et lui donner des missions supplémentaires qu'avait l’ONCPB (Office National de Commercialisation des Produits de Base, Ndlr) dans le temps. Je pense qu’avec ce message, les Camerounais vont prêter attention. Avec cette équipe, les Camerounais vont prêter attention, parce que certains membres de cette équipe sont déjà connus sur le terrain.
Et ils diront, voilà une nouvelle proposition, faites-nous confiance, voici comment on va changer le pays et je suis optimiste. J'aurai le temps de le faire. N'oubliez pas que nous sommes fin juin. On a juillet, août, septembre. Ces trois mois-là seront très actifs pour nous et toute l'équipe.
Vous parlez d'un parti qui va vous investir, en gardant le mystère autour. Peut-on savoir qui se cache derrière Jacques Bouhga ?
Personne ne cache derrière moi en tant que tel ; c'est une discipline de communication. Je laisse le soin au parti d'organiser la communication de ma candidature. Je ne veux pas anticiper les choses. N'oubliez pas que le parti c'est toute une structure, ce n'est pas une personne. C'est une équipe qui a sa stratégie de communication et je dois la respecter.
Mais je peux vous garantir que nous sommes en train de travailler pour que bientôt le parti puisse communiquer là-dessus ; et mon souhait est que ce soit une coalition autour du parti politique qui m’investit. Il y a un parti qui m'investit certes, mais un seul parti ne peut pas gagner les élections au Cameroun. En tout cas, pas un seul parti d’opposition.
Il faudra une coalition. Je suis en train de la bâtir. Bientôt on aura peut-être un communiqué de presse annonçant la nouvelle coalition qui soutient ma candidature. Mais je laisse le soin à ces partis politiques d'organiser la communication.
Je ne veux pas être superstitieux mais si je m'en tiens à une certaine prophétie attribuée à Um Nyobè, le 3ème président du Cameroun sera un monsieur inconnu du grand public, qui viendrait de l'extérieur, pour sauver le Cameroun. Vous parlez avec tellement d'assurance qu'on a l'impression que vous savez exactement où vous allez. Vous sentez-vous dans la peau de celui-là ?
Disons que c'est le peuple camerounais qui va décider du 3ème président de la République du Cameroun. J’essaie de le convaincre. Pour moi, je vois ceci comme un examen que je dois passer. Il y a l'oral, il y a l'écrit. L'écrit c'est le projet de société que j'ai écrit ; l'oral, ce sont des interviews, ce sont les débats. Donc c'est le peuple qui va dire si j'ai passé l'examen ou pas. Je suis confiant parce qu’on ne peut pas aller à une élection présidentielle si on n'a pas confiance en soi.
Une fois que vous devenez président de la République, vous êtes comme le pilote de l'avion. Vous avez l'avion qui est en l'air, vous avez des passagers avec vous. Un pilote a intérêt à être confiant. Un pilote doit savoir où il va. Un pilote doit maîtriser les paramètres de vol. Un pilote doit pouvoir atterrir à bon port. Et pour moi quelqu'un qui n'a pas confiance en lui ne doit pas être président de la République. On ne veut pas d’un président qui tremble.
Un président est le chef suprême des armées. Vous ne pouvez pas trembler si vous êtes le chef suprême des armées. Vous serez le chef de la police, le chef de la gendarmerie, vous aurez toute une administration, vous aurez des emplois à créer. On ne peut pas trembler. Et là dans ce cas d'ailleurs, on fait face à une grosse machine qui est habituée à tricher et qui est prête à tout pour tricher. Il faut être prêt à l’affronter et leur montrer qu'on n'a pas peur d'eux.
Vous proposez « un nouveau départ », ça veut dire que l'ancien départ à échoué. Concrètement qu'est-ce que vous mettez dans ce nouveau départ, pour que le camerounais vous croient ?
Cet ancien départ a échoué parce que c'était centré autour de l'État. C'est l'État qui faisait tout, c'est l'État qui voulait se mettre au centre de tout. Ici le nouveau départ remet l'État à sa place dans les cinq secteurs dont je parle. Le nouveau départ repose sur ceux qui ont vraiment de l'argent. Dans une économie en réalité, ce n'est pas l'État qui a l'argent, c'est le peuple qui a l'argent, c'est le peuple qui donne à l'Etat. Je dis donc que ce modèle n'est pas bon.
L'État ne peut plus être au centre. Remettons maintenant le peuple au centre parce que c'est lui qui a de l'argent dans les téléphones et c'est lui qui va acheter les actions pour financer les grands projets. L'État ne sera plus l'actionnaire des entreprises publiques. C'est le peuple qui sera l'actionnaire de ces entreprises qui deviendront des entreprises populaires et qui vont remplir les missions de service public.
Le nouveau départ concerne aussi notre fierté. Il y a le problème de tribalisme chez nous, le manque de fierté de soi,… regardez l’état de nos routes détruites depuis des années, c'est un manque de fierté. Nous devons restaurer notre fierté. Ce nouveau départ, c'est un départ qui va considérer notre diversité ethnique, culturelle comme un avoir, comme un atout.
Et les gens vont voir lorsque je vais construire les musées ethnoculturels pour chaque communauté ethnoculturelle de notre société. Les gens vont découvrir la beauté artistique, les gens vont voir les masques traditionnels, Ils vont voir les habits traditionnels, ils vont voir l'histoire riche, millénaire de l'Afrique, de diverses communautés. Ils vont être eux-mêmes fiers de qui ils sont, en regardant simplement la beauté de notre diversité culturelle.
On va restaurer la fierté d'être Camerounais à nos frères et sœurs anglophones du Noso (Nord-Ouest et Sud-Ouest) en leur montrant la similitude de notre héritage ethnoculturel. En réalité, beaucoup de nos frères et sœurs anglophones sont des communautés ethnoculturelles du monde francophone également. Quand ils vont voir la communauté, le fond ethnoculturel similaire, je pense qu'ils vont retrouver cette fierté d'être Camerounais.
Et nous allons créer une académie de langues du Cameroun qui va non seulement préserver nos langues ethnoculturelles du Cameroun, les 250 ou 300, mais également fabriquer une langue nationale à partir des langues ethnoculturelles du Cameroun. Nous avons besoin de notre langue camerounaise. Vous et moi, sommes des Africains, des Camerounais. On est obligé d'utiliser les langues des Européens.
Ce n'est pas normal. On ne doit pas continuer comme ça. Il nous faut notre propre langue camerounaise qui nous permettra de communiquer entre nous sans avoir besoin d'une langue européenne. Le français et l'anglais seront relégués au statut de langues de travail. Voilà un peu ce nouveau départ dont je parle : un, fierté ; deux, modèle de financement populaire ; trois, remettre le peuple au centre du jeu politique.
En quoi consiste ce modèle de financement populaire ? Vous parlez beaucoup du téléphone, comment ça va fonctionner?
Supposons par exemple qu'une route coûte 10 000 milliards fcfa. L’Etat n’a pas de moyens. Les 10 000 milliards fcfa, comment l'entreprise va les lever ? Dans le domaine des routes, je vais créer deux entreprises populaires. La première s’appellera « Autoroute d'Afrique ». Elle va faire les grands axes routiers et les grandes voies ferrées du Cameroun. La deuxième sera la Société nationale de routes du Cameroun qui va faire les routes urbaines.
Étant donné que l’Etat n'a pas les 10 000 milliards pour les routes, les deux entreprises populaires dont je viens de parler vont émettre les actions pour 10 000 milliards fcfa, à raison de 100fcfa par action. Celui qui a 200fcfa achète deux actions, celui qui a 500fcfa achète cinq, ainsi de suite. Voilà comment les entreprises populaires vont lever les fonds pour construire les routes. Et ces fonds pourront être levés très rapidement, parce qu'il y’a énormément d'argent qui circule dans le téléphone.
En 2023 déjà, le volume des transactions dans le téléphone était de 24 000 milliards fcfa. En 2025, on doit être autour de 30 000 milliards fcfa; ça n'inclut pas la diaspora. Ça n'inclut pas les gens qui n'ont pas le téléphone. Ça n’inclut pas les gens qui n’ont pas accès à internet. Ça n'inclut pas les entreprises parce que les entreprises ne font pas les transactions dans le téléphone.
Avec l’application téléphonique de l’Etat que j’appelle “fichier unique”, je pense que les entreprises pourront faire les transactions facilement dans le téléphone également. Ce qui permettra vraiment de mobiliser une épargne conséquente, y compris celle de la diaspora, pour le développement du peuple. Ce modèle va permettre de financer rapidement toutes nos infrastructures publiques. L'État ne sera plus au centre. L'État se contentera de donner une orientation stratégique.
Vous annoncez "l'Agricultural Development Corporation" qui viendra remplacer la CDC. Qu'est-ce que vous reprochez à la CDC aujourd'hui ?
Non! Non! Je ne reproche rien à la CDC. Je veux étendre ses missions, parce que dans l'agriculture il y a trois aspects : l'aspect foncier, l'aspect d'encadrement technique, l'aspect d'écoulement. L'aspect foncier, je le règle en numérisant le cadastre, en simplifiant les procédures. L'aspect d'encadrement et l'aspect d'écoulement doivent être faits par une entité qui va aider les agriculteurs de manière permanente.
La CDC est déjà un socle de départ, elle doit continuer à faire ce qu'elle fait, mais doit étendre ses missions. Concrètement, j’appelle la nouvelle entreprise même Agropastoral Development Corporation, parce qu’il y a aussi l'élevage. Ce ne sera pas que l'agriculture. Les éleveurs et les agriculteurs signeront des partenariats avec l'entreprise. Un agriculteur pourra dire: J'ai tel nombre de régimes de plantain que je peux produire, l'entreprise l'enregistre comme partenaire pour le plantain.
Pour ce qui est de l'encadrement technique, les ingénieurs agronomes de l’entreprise pourront venir surveiller si l’agriculteur gère bien son champ. L’entreprise va facturer cela à l’agriculteur mais il ne va pas payer sur place, étant donné qu’il est déjà partenaire. Ces ingénieurs viendront et donneront des conseils techniques. Ils pourront dire la quantité et qualité d’engrais ou d’autres produits à mettre. L’entreprise pourra même leur prêter ces produits. Dans ce cas, ils auront une dette auprès de cette entreprise.
Mais une fois que l’agriculteur a fini de produire, l’entreprise pourra prendre sa production et se faire rembourser. L’entreprise aura des dépôts un peu partout au Cameroun. Je viens au dépôt avec mon régime de plantain ou mon régime de noix de palme, ou pour les éleveurs, ma chèvre. Combien pèse le régime de plantain, la chèvre, le porc,…le dépôt l’enregistre. Dès que le dépôt pèse, vous connaissez le prix par kilo, l’entreprise déduit ce que vous leur devez et vous donnent votre argent sur le téléphone. Voilà un peu comment le modèle va fonctionner.
Il permettra aux agriculteurs, aux éleveurs de vivre dignement de leur activité, de ne plus avoir le stress de l'écoulement ou de l'encadrement technique. Je peux vous assurer que c'est extrêmement important. Maintenant, cette entreprise pourra créer des succursales, elle pourra vendre ses produits de manière brute, elle pourra avoir des partenariats avec des commerçants. N'oubliez pas que cette entreprise doit être dans les mains du peuple, parce que les mêmes agriculteurs, les mêmes éleveurs, seront ses actionnaires. Ils pourront également profiter des fruits de la transformation de leurs produits agricoles. Voilà un peu comment je compte reformer tout ça.
Vous parlez de numérisation, de téléphone, dans un environnement où l’énergie est une denrée rare, et où le coût de la vie est élevé…
Non, pour les téléphones, je signerai un partenariat avec les entreprises de téléphonie et celles qui produisent des kits solaires, parce que ce n'est pas que le téléphone. Vous avez bien fait de mentionner les deux parce que le kit solaire permettra de recharger le téléphone. Ces deux aspects seront réglés en même temps. Donc quand l'État te donne le téléphone, il te donne également un kit solaire au cas où quand tu n'as pas d'énergie, au moins le téléphone fonctionne.
Et pour les data, avec l'application fichier unique, les gens n'auront pas à payer les data, parce que c'est l'État qui va régler cette affaire avec les opérateurs de téléphonie. Ce sera un service public. Une fois que vous avez les data, vous avez accès au marché financier. Quelle est l'incitation pour les gens d'utiliser les téléphones? L'État dira que les aides que je vous donne ne pourront passer que par le téléphone. Et si vous voulez que je vous aide, il faudra avoir un téléphone.
Tout le monde aura cette incitation. Ceux qui n'ont pas les moyens d'acheter un téléphone pourront recevoir les aides de l'État. Ceux qui ont les moyens n'auront pas besoin d'aide. Voilà comment je vais distribuer les téléphones à tout le monde et m'assurer que tous les Camerounais travaillent avec l'État à travers l’application téléphonique “fichier unique”.
N'oubliez pas que le “fichier unique” aura une reconnaissance faciale. L'État saura qui est qui. L'État aura le visage de chacun. Avec un tel système, il sera plus facile d'avoir la carte nationale d'identité. Vous pourrez demander votre carte d'identité nationale à travers le téléphone. Puisque l'État aura vos photos et si la photo est trop vieille, l'État vous dira où aller la renouveler pour en avoir une récente. Donc voilà comment je compte gérer tout ça.
C’est très beau et très facile. Vous voulez parachuter une telle idée de Breton Woods au Cameroun. Il y a un environnement qui n'est pas habitué à cette « révolution ». Comment comptez-vous ramener les Camerounais dans un tel système, et combien de temps vous faudra-t-il pour cela ?
Ça c’est une affaire de quelques mois. Les compagnies de téléphonie existent déjà, les applications existent déjà, maintenant ce que les informaticiens de l'État feront peut-être, est qu’ils iront prendre le code source et adapter les applications. Toutes ces applications ont des codes sources. Je ne veux pas faire de publicité ; il y a des compagnies de téléphonie ici qui ont des produits similaires, des applications où on peut acheter des crédits, on peut acheter, faire ceci, faire cela.
On prend juste le code source, on l'adapte et on paye un certain montant à la compagnie pour son code source. On prend le code source, on crée l'application « fichier unique » qui va répondre aux besoins de l'État et on lance l'affaire. Maintenant l'incitation visera à amener les Camerounais à utiliser cela. L'État vous dit, « si vous voulez de l'aide, passez par le téléphone ».
Par exemple dans une zone sinistrée, l'État veut que vous passiez par le téléphone pour recevoir de l’aide. On vous identifie comme victime, mais pour que vous ayez de l'aide, vous devez avoir un téléphone. Vous avez été identifié comme victime de la catastrophe naturelle, des inondations et autres ; pour que l'État vous envoie de l'argent, vous devez demander cet argent par le téléphone. Ça ne passe pas par des intermédiaires. Vous travaillez directement avec l'État.
Moi je pense que ça va créer une incitation, déjà que l’Etat aura des restaurants publics et dortoirs publics. Vous voulez manger matin midi et soir, vous devez passer par le téléphone parce que vous ne pourrez pas passer comme ça dans un restaurant où vous voulez qu'on vous donne à manger. Il y aura des contrôles.
Il faudrait que lorsque vous partez là-bas, vous ayez au préalable demandé de l'aide de l'Etat dans votre “fichier unique”. On saura que l'Etat vous a accordé cette aide pour manger dans tel ou tel restaurant. Vous ne pourrez pas manger n'importe où. Dès que vous arrivez là-bas on va scanner le téléphone, on va dire oui vous êtes qualifiés pour manger ici, et on vous donne le repas.
On ne tend pas vers le communisme là ?
Non, ce n'est pas le communisme. Je veux m'assurer que chaque Camerounais peut manger. C'est un État inclusif qui assure que le minimum vital est fourni à chacun. Pour moi c'est vital. Le minimum vital c'est manger matin-midi-soir, c'est avoir un endroit où dormir dignement. Pour moi c'est crucial que le minimum soit fourni, je ne veux pas voir ce que j'ai vu en Europe où les gens dorment dans la rue ou les ponts.
Pour moi le minimum vital c'est que chaque enfant aille à l'école. Je ne veux pas voir les enfants qui errent dans les rues, les enfants qu'on appelle "Nanga Boko", je ne veux pas voir ça. Je pense que si l'État se retire des autres domaines, il aura suffisamment de ressources pour remplir ses objectifs sociaux. Maintenant, n'oubliez pas, ce n'est pas gratuit. Maintenant, c’est sous condition. Si vous êtes un élève ingénieur qui cherche juste à avoir le temps de se relever, c'est un contrat d'ajustement ; vous remplissez certains objectifs avant d’obtenir de l’aide.
Vous allez finir telle formation d'ici tel délai, vous allez chercher des emplois. Maintenant, si vous êtes quelqu'un de moyen et que vous êtes jeunes sans travail, vous devez faire une formation, qui vous plaît pour trouver un emploi. L'idée c'est de vous aider à sortir du système d'aide, d’assistance de l'État.
C'est un peu comme quelqu'un qui vit sous perfusion, il faut à un moment qu'on enlève la perfusion. Pour cela, ce seront des aides sous condition. Ce n'est pas du communisme. Si vous pouvez faire quelque chose, vous aurez un contrat d'ajustement. Voilà pourquoi je parle d'un fonds d'ajustement qui va guider et conditionner l'aide de l'État. Vous passerez des revues tous les trois mois, tous les six mois un peu comme le FMI fait pour continuer à recevoir l’aide de l’Etat.
Vous avez évoqué le volet social, et je vous invite à vous intéresser à la partie septentrionale du Cameroun qui en est particulièrement concernée. C'est une zone d'éducation prioritaire, et qui connaît un déficit en établissements sanitaires. Qu'avez-vous envisagé pour en finir avec cette situation misérable ?
Deux choses. Première chose, tout le monde aura un téléphone et un chargeur solaire. Ceux qui sont sinistrés dans cette région vont recevoir directement l'aide de l'État. Sur le plan de l'éducation, je mise beaucoup sur le télé-enseignement. Donc tous les cours du cursus général seront dans les téléphones.
Ceux qui pourront s'éduquer vont le faire directement dans les téléphones, en attendant que les écoles soient construites, puisqu'on ne peut pas les construite en un jour. Déjà avec les téléphones, tout le cursus de la maternelle jusqu'à l'université, tout ce qui est cursus général sera dans le téléphone.
Maintenant, pour ce qui est des cursus spécialisés, les formations techniques, ça viendra progressivement. Donc déjà sur le plan de l'éducation je pense qu'on va rattraper très rapidement les retards parce que, une fois qu'ils ont les cours sur le téléphone, ils pourront passer les examens plus facilement, les fondamentaux, en matière de littérature, en matière de science… ils auront déjà tout dans le téléphone.
Ça va permettre de résorber le retard. Maintenant, sur le plan de l’aménagement du territoire, j'appelle le grand réseau d’autoroutes que je vais construire le “SAPIN” parce que c'est un réseau autoroutier qui va permettre de désenclaver toute cette partie du pays très rapidement. Quand je dis que je construis ces routes, chaque entreprise construira avec son petit bout de 100km.
Donc dès les premiers mois, ils vont voir également les routes construites les routes du “SAPIN”, le grand réseau routier. Dans ce réseau routier, on va mettre des canalisations souterraines pour gérer tout ce qui est liquide et électrique. Ceci permettra de leur apporter de l'eau, et tout ce qui est électrique. Donc on va régler ces problèmes d'eau qu'ils ont là-bas.
Je sais qu'ils ont également des nappes phréatiques en dessous. Au moins on va s'assurer que tout le Cameroun, y compris la zone du Grand Nord, a résolu son problème d'eau. Je mettrai également autour de toutes ces autoroutes-là, des arbres. Ce sera une obligation constitutionnelle de l'État; ce qui va forcer l'État à planter les arbres partout dans ces régions. Donc si l’Etat ne remplit pas cette obligation, les citoyens pourront poursuivre l'État en justice.
Hysacam sera transformée en entreprise populaire. Il y aura les déchets organiques qui seront séparés des autres déchets. Les déchets organiques vont être séchés, brûlés pour produire de l'énergie électrique et la cendre qui viendra de là sera utilisée pour enrichir les sols. Donc il y aura un partenariat entre le ministère de l'Agriculture et Hysacam pour acheter la cendre, distribuer aux agriculteurs, mais également donner à l'Etat qui va planter tous ces arbres-là.
Donc si vous voulez mettre un arbre, il faut lui mettre de la cendre organique pour l'enrichir. Pour tous les excès, il y aura des régions qu'on va identifier pour la verser et enrichir les sols. Avec l'eau qui vient du sud, on pourra facilement irriguer tous ces endroits-là, parce que l'État devra normalement irriguer tous ces endroits-là.
Une fois de plus, ce sera son obligation constitutionnelle. Voilà un peu comment je compte régler l'affaire et désenclaver les régions de l'Extrême-Nord et du Grand-Nord en général. En plus de cela, je vais créer de l'activité dans ces zones. Voilà pourquoi je vous ai dit que chaque département devra avoir au moins une zone industrielle et un pôle urbain.
Ce qui permettra à l'Etat d'orienter certaines entreprises dans ces régions-là. C'est une région où on peut faire des plaques solaires, une région où on peut transformer le coton, il y a des industries. Il y a beaucoup d'activités qu'on peut y faire. On peut transformer les produits d'élevage. On peut également faire du tourisme.
Et sur le plan routier et des transports en général ?
J’envisage le procédé de lévitation magnétique pour les voies ferrées. C'est un système où les trains ont les aimants qui les guident. L'énergie solaire produit du champ magnétique qui guide les trains. C'est un peu plus cher à installer, mais ça vaut le coup. Parce qu'une fois installée ça peut atteindre les 500, voire 600 km/h. Et là on est à 1200 km du Sud ou Nord Cameroun.
On pourra faire une telle distance en 2-3h. Il vaut mieux qu'on investisse dedans maintenant pour gagner en productivité. Ça veut dire que je pourrais quitter de Douala, je passe par ce train, j'arrive au Nord en moins deux ou trois heures. On désenclave complètement ces régions. Là maintenant il te faut trois jours pour arriver au Nord à partir du Sud. Voilà comment je compte désenclaver ces régions.
Ce sera aussi facile ? Où trouverez-vous les moyens pour cela ?
La plateforme pour l'actionnariat populaire est importante. Il faut financer l'économie, intégrer l’économie du sud à l’économie du nord. Ça se fera sur téléphone. Vous voyez qu'on ne peut pas faire ça sans téléphone. C'est un investissement pour l'État ; ce n'est pas du social. L'État investit là-dessus. Tous les éleveurs du Grand- Nord, tous les agriculteurs du Grand-Nord, quand ils obtiennent leurs paiements de l'ADC, ils achètent des actions dans les entreprises d'ici et d'un peu partout.
Voilà comment on intègre tout le monde en même temps. Et ils ne seront plus isolés. On peut lever 20 000 milliards fcfa en quelques jours ou quelques heures. On n’a pas besoin de Washington ; la diaspora peut y mettre également beaucoup d'argent.