Cameroun - La nouvelle criminalité routière : résultat de la vie chère !

TRIBUNE. La lecture de Renaud Vireil Eboto sur l'insécurité ambiante et le cours de la vie au Cameroun. Le journaliste et écrivain propose également des issues de sortie.

Les nouvelles formes d’agressions nocturnes sur nos grands axes routiers Douala-Yaoundé, Yaoundé-Bafia et Yaoundé-Bafoussam pour ne citer que ceux-là ne sont que le résultat de la vie chère. Le mode opératoire est vraiment très simple : armés de cailloux et cachés dans la broussaille, ces jeunes prennent pour cibles des automobilistes qu’ils forcent à s’arrêter en leur lançant sur le pare-brise de grosses pierres. Posons-nous la question de savoir pourquoi ? Parce ce que ce sont des jeunes désœuvrés, qui n’ont pas d’emplois, qui vivent dans une société où on leur a montré que l’argent est une valeur et qu’il y en a qui ont cet argent facilement en dépouillant les caisses de l’Etat, notamment les lignes 94, 65 et 57. Cette jeunesse vit dans un environnement où on ne parle de détournement qu’en termes de milliards de CFA. Ces jeunes ont donc opté se transformer en coupeurs de routes, le caillou à la main comme une forme de revendication. Pourtant et on ne le dira jamais assez, le pouvoir d’achat est très faible au Cameroun qui autrefois était la locomotive de l’Afrique Centrale. Est-ce toujours le cas ? Pas si sûr tant on sait que le Cameroun importe désormais l’huile rouge du Gabon. D’ailleurs un classement faisait le mois dernier du Cameroun la 24ème économie d’Afrique derrière le Congo, la Guinée équatoriale et le Gabon. Difficile à avaler pour un pays qui jadis fut la 8ème économie africaine dans les années 1990. L’on apprend que cette année l’Etat pourrait financer à hauteur de 750 milliards de CFA le prix du carburant à la pompe ? Même si la loi des finances 2023 annonce 350 milliards de francs CFA. Pourtant avec ces 750 milliards le Cameroun pourrait augmenter le pouvoir d’achat de ses populations qui est extrêmement faible, de 82% plus faible que celui de la France. Le revenu moyen par habitant de la population active au Cameroun est de 112 euros par mois environ 73 mille francs, avec un SMIG toujours bloqué à 36 mille francs malgré les rumeurs qui l’annonçait à 41 500 frs. Comment juguler la situation ?

En augmentant de manière significative les salaires de la fonction publique dont la masse salariale oscille autour de 1000 milliards de CFA. Injecter 250 milliards permettrait aux salaires dans le public de connaitre un bon d’au moins 25%. L’harmonisation entre les salaires les plus élevés et les salaires les plus bas permettrait de résoudre le reste. En clair entre le salaire brut le plus bas 40 000 frs et le salaire brut le plus haut 800 000 frs il y a une trop grande différence. Le SMIC serait augmenté au passage au minimum à 60 mille francs ce qui boosterait les salaires dans le secteur privé. Deuxièmement, 250 milliards permettraient de construire une raffinerie digne de ce nom pour jouer le rôle qu’aurait dû jouer la SONARA depuis sa création il y a 47 ans et les derniers 250 milliards permettraient d’investir dans le secteur productif local dont les trois secteurs prioritaires sont connus : agro-alimentaire, coton-confection textile cuir et forêt-bois. Pour finir, il faudrait diminuer les impôts et taxes et élargir plutôt l’assiette fiscale avec plus de 90% de la population active se retrouvant dans le secteur informel. Cette baisse des impôts inciterait les acteurs du secteur formel à se formaliser et donc rapporterait plus d’argent dans les caisses de l’Etat. Le taux de chômage au Cameroun était selon les chiffres de 6,1% en 2021. En clair sur une population active de plus 18 millions de personnes plus d’un million majoritairement des jeunes n’ont rien à faire. Cette jeunesse désœuvrée qui ne peut se plaindre, qui ne peut grever mais qui a choisi de se lancer dans cette nouvelle forme de criminalité que doit-on en faire ? La jeter en prison ? Nos prisons sont déjà surpeuplées. Et bien il faut créer des emplois, d’où la nécessité de mettre de l’argent dans le secteur productif, de créer des champions nationaux dans ces secteurs qui vont embaucher tous ces jeunes. Il faut créer des industries locales et passer de la production artisanale à la production industrielle. Le Cameroun a un potentiel de consommation de 30 millions de personnes et est adossé sur le Nigéria un atout indéniable et qui représente à lui tout seul 200 millions de consommateurs, sans compter la Guinée Équatoriale, le Gabon, le Congo, le Tchad et la RCA. En attendant des réformes courageuses qui auraient dues être prises déjà avec l’arrivée du Covid-19 ou même au bénéfice de la crise Russo-Ukrainienne, nos jeunes sombrent dans la criminalité.

Vireil Renaud EBOTO

 

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